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Les puits de la Mure en 2016

VISITE DE PIERRE OMBROUCK AUX MINES DE LA MURE

(BASSIN DU DAUPHINE) LE 9 JUIN 2016

Qui pourrait imaginer un immense terril verdoyant dont le sommet formerait un plateau de 20 km de long sur 13 km de large, mais à 1000 m au-dessus du niveau de la mer ? Il existe : c’est la Matheysine, coincée entre quatre vallées dont celle du Drac, sauf que ce qu’elle contenait - et contient toujours dans des quantités bien moindres - n’était pas des stériles mais de l’anthracite d’une si bonne qualité qu’il faisait sa renommée et sa richesse.

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Plateau de la Matheysine que des nuages viennent chatouiller entre Laffrey et La Mure

Après plusieurs contacts avec les Maires en charge de ces sites - enfin reconnus en 2015 et labellisés « Patrimoine en Isère » - je suis parti visiter le puits des Rioux à Prunières et celui du Villaret à Susville, ayant surtout à cœur de voir de plus près ce dernier que j’avais frôlé à plusieurs reprises mais sans avoir pu lui accorder du temps. D’ailleurs, l’un comme l’autre sont inaccessibles, sauf pour les vandales et les ferrailleurs, aussi c’est à croire que mes arguments ont inspiré confiance puisque les deux Maires m’avaient donné leur accord, me proposant même les clés de leur puits respectif pour que je puisse visiter seul.

C’est à 9 h 30 ce 9 juin que je me suis présenté à la Mairie de Prunières où j’étais attendu, mais avec une surprise qui, elle, ne l’était pas ! Un Conseiller Municipal, de surcroît ancien Mineur, allait m’accompagner et répondre à mes questions. Je ne pouvais imaginer mieux comme accueil, et d’autant plus qu’il habitait la maison la plus proche du bâtiment à visiter.

1° PRUNIERES : PUITS DES RIOUX (ex-Puits Henri de Rénéville) :

En Mairie : Maquette du chevalement du puits Rioux

Face au puits : berline de 3.000 litres typique du lieu

Chevalement restauré en attente d’un éventuel projet

Christian Arnaud, ancien électromécanicien du Rioux

Foncé de 1942 à 1946, ce puits avait 4 m de diamètre et 400 m de profondeur. Il servait pour le personnel et le matériel ainsi que de retour d’air. Son activité s’est arrêtée en 1984.

Chevalement au niveau du carreau et puits rebouché.

Cage à 2 étages (et non 3 comme lu sur Wikipédia)

Le puits des Rioux était le plus profond de la région et, comme pour celui du Villaret, sa largeur de voie était de 60 cm, ce qui permettait l’interchangeabilité des matériels roulants

Détail des guides et des glissières en chêne graissé

Rails face à la cage et menant à la sortie du bâtiment

Ventilateur centrifuge - retour d’air (Solyvent-Ventec)

Machine d’extraction à tambour cylindrique (Vénot)

A l’époque où le chanteur Renaud composait « Tout in haut de ch’terril », l’ancien Mineur Arnaud devait sûrement fredonner « Tout en haut du chevalet », car non seulement le panorama est superbe mais il habite juste à côté et peut y monter l’admirer toute d’année.

Conseiller Municipal de Prunières, il m’a fait part d’un projet de commémoration des deux accidents miniers des 16.1.1946 et 4.5.1971, lesquels, à chaque fois, ont tué huit Mineurs.

Avant de prendre congé de lui-même et du Maire, je leur ai demandé de nous en informer le moment venu et leur ai promis que l’APPHIM ferait un article qui signalerait cette action.

Enfin, à leur demande, ce récit leur sera envoyé pour rester en mémoire de mon passage.

2° SUSVILLE : PUITS DU VILLARET

Foncé de 1948 à 1950, ce puits atteignait les - 260 m et son diamètre de 6,5 m permettait la descente du matériel et l’extraction de l’anthracite. L’un des tout derniers à maintenir son activité puisqu’elle ira jusqu’au crépuscule du 20ème siècle, il fermera le 20 mars 1997.

Comme celui des Rioux, il bénéficie depuis peu d’un label de « protection », mais toujours pas d’un réel projet de mise en valeur, si ce n’est la peinture appliquée par des bénévoles. Côté « protection », elle se résume à mettre un cadenas aux ouvertures conservées et à souder les autres, mais les ferrailleurs ont déjà fait table rase des métaux rémunérateurs, de même que la venue de voyous n’a laissé que des tags, vitres brisées et autres méfaits.

Une partie de son matériel a été reprise par le Musée de La Motte d’Aveillans, échappant ainsi aux prédateurs, mais il reste de quoi nous émerveiller, dont un culbuteur de berlines.

Au mépris de tout, les récupérateurs de métaux se sont approvisionnés et les tagueurs se sont manifestés.

D’ailleurs, l’extérieur des bâtiments donne déjà une idée de ce qui nous attend à l’intérieur.

Quel est le sens de ce barbouillage ?

Qu’a bien pu rapporter la revente du cuivre de ce local technique ?

Même la machine d’extraction n’a pas été épargnée

Les câbles et tuyauteries du loco Berry ont disparu

Heureusement que même un ancien Mineur peut sublimer de manière artistique et dans la plus belle des expressions ce qui fut son travail et celui de ses collègues, rappelant cette épopée de l’extraction d’anthracite en Matheysine et sans dénaturer son superbe paysage.

Peut-on dire autre chose que « Chapeau l’artiste » ?

Quelle région a vu se tutoyer la neige et le charbon ?

Et quel Maire confierait à un quidam les clés de son patrimoine ? Celui de Susville l’a fait et je l’en remercie.

Quant au locotracteur Berry, il ne rejoindra pas le fier Musée de La Motte d’Aveillans où il aurait pu être exposé près du C 3755 K3 qui s’y trouve déjà. Car ils étaient trois engins de ce type, construits à Lille pour les Houillères de la Loire. Au moins deux d’entre eux ont ensuite rejoint les Mines de La Mure, dont le n° 783 dudit Musée et le n° 781 du Villaret. Qu’est devenu le n° 782 ? Est-il arrivé lui aussi aux Houillères du Dauphiné ? Un mystère ! Ce Berry continuera donc d’accompagner le culbuteur de berlines et la pelleteuse Yumbo.

Culbuteur de berlines

Tracto-pelle modifié à commandes pneumatiques

Autres dégâts de vandales

Pour le reste, et afin d’éviter le retour de telles exactions, la Commune a pris des mesures. Hormis l’énorme matériel d’extraction, la salle des machines a été vidée de son contenu, de même qu’une bonne partie du matériel de la recette du jour a été transférée au Musée.

Salle des machines enfin mise à l’abri des tentations.

Même opération pour le bâtiment de recette du jour.

Quel dommage de voir les instances régionales réagir si tardivement et après ces dégâts. Le Puits du Villaret mériterait pourtant une autre attitude à son égard, or c’est de peu qu’il a évité la destruction. L’argent manque peut-être mais bien moins que la volonté politique !

3° LA MOTTE D’AVEILLANS : MUSEE DE LA MINE

Musée de la Mine de La Motte d’Aveillans (alt.872 m)

Mine Image sous le chevalet du puits Sainte-Marie

Visité une première fois en août 2015, je n’ai pas manqué d’y retourner dans l’espoir d’y découvrir ce qui avait été ramené du puits du Villaret. Bon accueil de la part des hôtesses bénévoles dont une m’avait reconnu, mais aussi de leur Directeur qui m’a permis d’aller photographier quelques-uns des éléments déjà restaurés et mis en exposition. Quel régal !

Poste de commande électrique

Repères pour machiniste de cage

Consignes sonores de manœuvre

Vitrines d’outils à main utilisés par les Mineurs

L’évidement en blanc simule une veine de charbon

Convoyeur à bande dont l’emploi dès les années 50 allait inquiéter les constructeurs de locotracteurs.

Loco électrique à perche Alsthom MF70, non issu de La Mure et de Messeix mais de la Ligne Maginot…

4° EPILOGUE

Il suffit de regarder cette photo pour comprendre à quel point toute la région est grandiose.

Au pied de la Matheysine coule le Drac. En face, le Mont-Aiguille où naquit l’alpinisme, culminant à 2.087 m

Toutefois, comme Prunières, Susville mais aussi les autres communes de la Matheysine, La Motte d’Aveillans souffre de l’arrêt du Train de la Mure qui était le principal attrait des dizaines de milliers de touristes qui venaient voir ce train et y monter afin de bénéficier d’un panorama inoubliable car unique. Mais depuis son immobilisation, l’office de tourisme de La Motte d’Aveillans a vu le nombre de ses visiteurs divisé par 20 et donc réduit à 5 %. Il en est de même pour son Musée de la Mine qui souffre terriblement de cette situation. Pourtant, le label Patrimoine du Dauphiné alloué aux puits des Rioux et du Villaret pouvait être l’élément fédérateur pour que ces trois sites miniers constituent un pôle d’authenticité. Or s’il suffit de dénommer Patrimoine tout ce qui est sujet à hésitation, autant ne rien faire.

A quand la décision claire et définitive de relancer enfin le tourisme dans toute la région ?

Article et photos de Pierre OMBROUCK pour l'APPHIM


Date de création : 14/06/2016 08:39
Dernière modification : 14/06/2016 08:39
Catégorie : Le bassin Centre-Midi|Le bassin du Dauphiné
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